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Le consentement

- Julie BOUCHONVILLE

Le consentement

Comment s’assurer qu’une personne autiste consent à ce qui lui arrive ? Comment peut-elle s’assurer que ceux qui l’entourent consentent à ses actions ? Et au fond c’est quoi, le consentement, au juste ?

Essayons de trouver des pistes.

 

Le consentement, un terme complexe pour une notion simple

Le mot en lui-même a un petit côté légal, et de par son usage, une suggestion de sexualité qui peut surprendre lorsqu’on le juxtapose avec des enfants. Pourtant, tout le monde utilise la notion de consentement. Quand on demande à un collègue si on peut lui emprunter son stylo, on s’enquiert de son consentement. Quand on demande à une personne en fauteuil roulant si on peut la pousser, quand un vendeur de magasin de vêtements s’assure qu’on est d’accord pour qu’il entrouvre le rideau de la cabine, quand le coiffeur pose la question avant de se mettre à nous masser le crâne – dans toutes ces situations, on est effectivement en train de demander un consentement.

 

Souvent, le consentement est intimement lié à la notion d’autonomie corporelle, c’est à dire, le droit de décider de ce qui arrive à notre corps, quand, et en quels termes. Par extension, cela peut aussi s’appliquer à nos propriétés, parce que souvent les objets personnels sont un peu traités dans notre esprit comme une extension de nous. (Au plus personnel l’objet, au plus ce traitement se vérifie : tout le monde ne demanderait pas avant d’emprunter un stylo, mais quasi tout le monde le ferait pour regarder dans un sac à main ou emprunter un portable.)

 

Pour qu’un consentement soit considéré comme valable, il doit répondre à plusieurs critères : d’abord, il doit être éclairé. Même un enfant comprend qu’il y a quelque chose qui cloche si une personne accepte une situation sans percevoir tout ce qu’elle implique. On ne peut pas consentir si on n’a pas toutes les informations en main pour décider.

Ensuite, il doit être libre de toute influence : si on a dû insister de nombreuses fois, mettre la pression à quelqu’un, voire lui faire du chantage, alors le consentement de cette personne n’a aucune valeur.

Enfin, il y a des cas où le consentement sera tacite, mais dans la plupart de nos interactions interpersonnelles, on essayera d’obtenir un consentement exprès. Le consentement tacite, c’est par exemple ce qui va se passer si une personne est victime d’un accident de voiture. Les secours arrivent, la personne est inconsciente et a besoin d’être opérée, on va partir du principe qu’elle a envie qu’on la sauve parce qu’on n’a pas de raison de penser qu’elle préférerait mourir de ses blessures. Son consentement à être opérée, intubée, etc. est tacite.

 

Et l’autisme, dans tout ça ?

Les autistes se retrouvent parfois dans des situations où on ne respecte pas, ou pas totalement, leur autonomie corporelle, et ce pour deux raisons principales. D’abord, parce qu’on a tendance à infantiliser les autistes[1]. Ensuite, parce que certaines personnes autistes sont assez dépendantes de leur entourage et/ou ont du mal à s’exprimer d’une manière qui sera comprise par lui.

 

Pourquoi ce lien entre infantilisation et non-respect du consentement ? Parce que souvent, en tant que société, nous ne cherchons pas à obtenir le consentement de nos enfants. Parfois, nous n’avons pas vraiment le choix : il faut bien changer cette couche, démêler ces cheveux, brosser ces dents, et si on peut reporter l’opération de quelques minutes en cas de besoin, on ne peut pas la zapper complètement. Parfois, en revanche, c’est plus une tradition qu’une nécessité : nous forçons les enfants à embrasser des personnes qu’ils n’ont pas envie de toucher, nous les forçons à porter des tenues qui leur déplaisent lorsque nous considérons que les circonstances le justifient[2], nous les forçons à continuer à manger alors qu’ils n’ont plus faim, nous montrons peu de respect pour leur sens de la propriété, parfois même nous les frappons[3].

Lorsque nous associons les personnes autistes à des enfants, nous prenons cette position de « je sais mieux que toi alors tu obéis et c’est tout », et oublions que nous avons en face de nous des personnes qui ont le droit de choisir ce qui arrive à leur corps et à leurs propriétés. Cela peut prendre mille formes, toujours basées sur une sorte de condescendance : la personne autiste ne comprend pas vraiment, n’exprime pas vraiment ce qu’elle ressent avec justesse, n’a pas vraiment les pieds sur terre, ne sait pas tout à fait ce qu’elle dit, nous remerciera plus tard, ferait pareil si les positions étaient inversées, etc.

 

Le second cas est bien sûr intimement lié à cette idée que la personne autiste n’est pas totalement, au fond, une personne : lorsqu’un autiste a du mal à s’exprimer d’une manière que son entourage comprend ou est très dépendant de ce dernier, il se retrouve dans la même situation qu’un jeune enfant. Il ne peut que subir ce qui lui arrive, et espérer que ceux dont il dépend auront ses meilleurs intérêts à cœur.

Bien sûr, quand on est cet entourage, on peut avoir du mal à comprendre ce que la personne désire, ou les détails de son émotion[4], etc. Je ne suggère pas que le moins que mon lecteur, et la société au sens large, puissent faire est d’apprendre à lire les pensées d’autrui.

Un bon début pourrait déjà être de chercher à recueillir le consentement même de ceux qui ont du mal à communiquer, et d’observer leurs réactions. Même quelqu’un qui ne parle pas du tout a une attitude différente en fonction de son humeur et de son degré d’approbation par rapport à la situation en cours. Même quelqu’un qui ne communique pas du tout mérite qu’on lui explique ce qui se passe, ne serait-ce que pour le principe. Et quand quelqu’un n’est pas d’accord avec ce qui lui arrive, il est important que nous le respections dans la mesure du possible – c’est à dire, si ce n’est pas une question d’urgence absolue.

 

Demander le consentement : les autistes aussi

Bien sûr, nous autres autistes aussi devons prendre l’habitude de nous assurer du consentement des personnes autour de nous, et ce même lorsque nous sommes enthousiastes ou lorsque nous l’obtenons d’ordinaire.

Transmettre cette notion à son ou ses proches autistes se fait surtout par l’exemple, comme la plupart des apprentissages. Tout le monde ne sera pas en mesure d’absorber cette leçon – une personne vivant avec un handicap mental, par exemple, peut ne pas comprendre le concept – mais il reste important de la pratiquer.

Lorsque nous empruntons un objet à notre proche autiste, lorsque nous l’aidons à manger, lorsque nous le touchons, etc, il nous faut nous assurer qu’il comprend et est d’accord – et en plus de cela, régulièrement, lui rappeler que nous devons tous agir ainsi, même lui. Cela n’empêche pas d’être spontané : par exemple, dans une situation où l’on caresserait les cheveux d’une personne qui aime d’ordinaire cela, on peut ne pas lui demander son opinion, mais notre respect de son consentement pourra lors s’exprimer par le fait qu’on arrête si elle le demande, ou qu’on n’insiste pas si elle se dérobe.

Comme tirer des conclusions sur base des actions de notre entourage n’est pas toujours notre point fort, il peut être très utile de narrer ce que l’on fait pour aider une personne autiste à conceptualiser ce qui se passe. Par exemple : « C’est important que je sache si tu es d’accord pour que je t’aide à te doucher. Est-ce que tu es d’accord ou est-ce que tu préfères te débrouiller seul ? » ou « Je préfère te demander au cas où tu aurais changé d’avis depuis la dernière fois : est-ce que je peux emprunter tes crayons de couleur ? ».

 

Nous sommes connus pour notre tendance à suivre les règles pour peu que nous les saisissions, et en nous expliquant le consentement en des termes que nous sommes capables de comprendre, nous pouvons apprendre à respecter autrui – car ce n’est, après tout, jamais que de ça dont il s’agit.

 

 

[1]Voir notre article du 23 février 2022 :

https://bienetreautiste.com/blogs/infos/de-l-infantilisation-de-la-personne-autiste

[2]Cela va du « mets un pull, je trouve qu’il fait froid et peu importe si tu partages mon sentiment » à « porte telle chemise pour voir ton oncle, c’est lui qui l’a achetée ».

[3]Rappelons que notre loi interdisant les châtiments corporels dans le cercle familial date de 2019, et qu’elle a eu beaucoup de mal à passer. Les chiffres varient, mais à l’heure actuelle, on estime que minimum 40 % des parents ont déjà mis au moins une fessée à leur enfant. Ça fait deux personnes sur cinq.

[4]Refuse-t-elle par exemple de mettre ce t-shirt en particulier ou est-ce le fait de s’habiller en général qui pose problème à ce moment ?


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