
Autisme et allergie : encore une comorbidité
- Julie BOUCHONVILLE

Récemment encore, j’ai commis l’erreur de débutante classique : considérer qu’il y avait quoi que ce soit dans mon corps qui ne soit pas en relation directe avec l’autisme.
Mon lecteur ne le sait sans doute pas, mais je vis avec des allergies au pollen très impactantes, à défaut d’être graves, depuis aussi loin que je m’en souvienne. J’ai toujours pensé que mon système immunitaire avait tendance à en faire des tonnes, sans que cela s’inscrive dans quoi que ce soit de plus vaste — et puis bien sûr, j’ai appris que ça aussi, c’était l’autisme.
Quel rapport entre allergie et autisme au niveau fonctionnel ?
Pour le dire simplement, il n’y en a pas. L’autisme affecte de nombreux systèmes du corps et personne ne sait encore ce qui le cause au juste, on ne peut donc pas complètement écarter que le système immunitaire joue un rôle, mais ce n’est pas dans cette direction que vont les pistes que nous avons.
Les allergies, elles, sont mieux comprises : on vulgarise généralement le phénomène en expliquant qu’il s’agit d’une réaction du système immunitaire à un agent inoffensif, l’allergène, qui va être traité comme s’il était dangereux et déclencher une réaction nuisible à la personne.
À quoi ressemble la comorbidité ?
L’allergie dans la population générale
Dans la population courante, non autiste, les allergies concernent 10 à 40 % des personnes selon une étude[1], un chiffre profondément inutilisable qui m’a beaucoup agacée lorsque je l’ai découvert. En diversifiant les sources, je suis tombée sur un ratio un peu plus raisonnable de 25 à 30 %[2] [3] [4].
Comparaison avec les autistes
Ce chiffre colle pas mal à celui utilisé pour les contrôles de cette étude[5] de 2018 : en associant les allergies alimentaires, respiratoires et cutanées, on obtient 26 % de l’échantillon qui souffre d’allergies. Chez les personnes autistes, en revanche, les trois types d’allergies additionnées amènent à 46 % de l’échantillon atteint d’une allergie ou d’une autre. C’est environ 75 % en plus, pas tout à fait le double, mais pas loin, soit une déviation très notable de la norme.
Cette déviation est elle-même plutôt en accord avec une autre étude[6] de 2014, qui elle portait spécifiquement sur l’asthme[7] et sur la corrélation inverse : elle a déterminé que les enfants asthmatiques avaient 85 % de chances en plus d’être autistes que leurs pairs non-asthmatiques[8].
Une autre étude[9], se basant spécifiquement sur les allergies alimentaires, détermine un ratio différent, mais néanmoins existant : 11,25 % des enfants autistes en souffriraient, contre 4,25 % des enfants non autistes — l’échantillon était assez large et l’étude menée sur une longue période, ce qui donne pas mal de poids aux données.
Les antihistaminiques sont-ils responsables de l’autisme ?
Non. Rien ne le suggère.
Les antihistaminiques pris pendant la grossesse peuvent-ils provoquer un TSA chez l’enfant ?
Là non plus, rien ne le suggère. Des études semblent en cours.
Pourquoi observe-t-on une covariation ?
À l’heure actuelle, on ne sait pas. J’ai conscience que ce n’est pas une réponse très satisfaisante, mais il existe encore de nombreuses inconnues lorsque l’on parle d’autisme, et celle-ci en fait partie.
Que retirer de cet article ?
À ceci, en revanche, je peux répondre.
Beaucoup de gens ont en tête le choc anaphylactique cher à la fiction : la personne allergique mentionne se sentir mal, s’enquiert d’une voix tremblante s’il y avait des cacahuètes dans ce plat qu’on vient de lui servir, puis s’effondre en poussant des râles. Par chance, un tel niveau de réaction est rare. Le plus souvent, l’allergie amène des sensations désagréables, pas toujours très identifiables si l’on n’a pas la référence — la littérature datant d’avant la découverte de la notion d’allergie mentionne parfois des gens qui « ne digèrent pas les fraises » ou sont « toujours enrhumés au printemps », et je pense qu’on peut affirmer que c’étaient des cas d’allergies très banales.
Il peut donc être pertinent de suivre de près ses propres symptômes, et d’identifier s’ils sont liés à une saison, la floraison d’une plante en particulier[10], la consommation d’un aliment, l’exposition à un certain animal, etc. Un rhume qui ne passe pas, des démangeaisons dans les yeux, une éruption cutanée sans raison, des soucis digestifs sortis de nulle part… Tout ceci peut être le signe d’une allergie, et la bonne nouvelle, c’est que ces symptômes, sources de beaucoup de mal-être, peuvent être contenus avec un traitement simple et peu coûteux : de bons vieux antihistaminiques.
Allergologue et autisme : est-ce compatible ?
Une visite chez l’allergologue permet de confirmer ou de détecter une allergie, mais il est à noter qu’une forme délicate de torture sera nécessaire pour ce faire. En effet, l’on utilise le plus souvent un test qui consiste à placer une goutte des allergènes les plus courants sur le dos de la personne, et ensuite à égratigner la peau en contact avec chaque goutte. C’est complètement indolore, mais les démangeaisons provoquées sont effroyables, et il faut rester plusieurs dizaines de minutes sans se gratter.
Cela permettra néanmoins de déterminer si un traitement est utile, si une désensibilisation est envisageable, etc.
J’espère avoir pu, avec cet article, rassurer mon lecteur : 100 % de ses expériences vécues sont bel et bien dues à l’autisme, et il n’y a rien en rapport avec son corps qui y soit étranger.
Et plus sérieusement, je souhaite bon courage aux personnes allergiques au pollen de bouleau. En cette saison, exister en extérieur n’est pas très amusant pour elles.
[2]https://www.ameli.fr/lille-douai/assure/sante/themes/allergie/comprendre-allergies#:~:text=La%20fr%C3%A9quence%20des%20allergies%20ne,%C3%A0%20l'allergie%20(atopie)% 3A
[7]L’asthme n’est pas toujours d’origine allergique, mais y est souvent liée.
[8]Notons que les chiffres ne sont pas terriblement significatifs non plus : 0,7 % de chance pour les non-asthmatiques, contre 1,3 % de chances pour les asthmatiques. On est très loin de la garantie.
[9]https://www.ajmc.com/view/is-there-a-link-between-autism-food-allergies-study-offers-hint-but-no-answers
[10]Cet outil est extrêmement utile pour savoir quels pollens sont dans l’air à un instant T : https://pollens.fr/
Pour toute question sur nos articles de blog, contactez la rédactrice à : juliebouchonville@gmail.com
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Bonjour
Cette histoire de système immunitaire m’interpelle.
Actuellement en questionnement sur un TSA, j’ai des symptômes très dérangeant au moment de la floraison du colza soit de fin mars à mi mai. L’an dernier en avril lors d’un IRm cérébral on me détecte une sinusite maxillaire bilatérale. Sur le coup je ne percute pas et là je fais le lien avec les colzas. Deux autres spécificités immunitaires chez moi : atteinte de douleurs chroniques avec un SDP et HLA B27 +, et lors de ma grossesse allo-immunisation foetomaternelle chez une primipare sans antécédents de transfusion ou FC. Immunisation forte contre plusieurs types.
Gamine je n’étais jamais malade.
J’ai toujours pensé que mon systeme immunitaire était particulier.
Voilà pour mon expérience
Merci pour cet article