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Autisme et conduite

- Julie BOUCHONVILLE

Autisme et conduite

Beaucoup d’autistes sont incapables de conduire un véhicule. Et beaucoup d’autistes sont d’excellents conducteurs. Que mon lecteur soit le proche d’une personne autiste se demandant s’il devra lui servir de chauffeur jusqu’à la fin de ses jours ou une personne autiste se demandant si ça vaut la peine d’essayer de passer son code, je vais tâcher ici de lui apporter quelques réponses.

 

Pourquoi conduire est difficile

Quel que soit le véhicule choisi, la conduite est difficile pour les autistes en raison de plusieurs facteurs. C’est un exercice complexe qui nécessite de pouvoir réaliser plusieurs tâches à la fois, d’en automatiser certaines, d’être attentif à tout un tas d’éléments de l’environnement et de bien maîtriser ses fonctions exécutives, entre autres afin de pouvoir déterminer quelles données sont utiles et lesquelles ne sont que du bruit de fond. Il faut également pouvoir se repérer un minimum dans l’espace, tant pour ne pas se perdre que pour comprendre les trajectoires à emprunter et prévoir celles des autres usagers de la route. Beaucoup d’autistes ont du mal avec toutes ces aptitudes.

C’est aussi un moment riche en stimulus (bruits, sensations tactiles, odeurs, …), ce qui peut être très perturbant.

Enfin, la tendance des autistes à suivre à la lettre les règles utiles fait que nous avons souvent beaucoup de mal à passer outre le comportement d’un autre utilisateur de la route qui ne serait pas aussi strict, voire à anticiper que quelqu’un puisse griller un feu rouge ou traverser sans regarder[1].

 

Passer le permis, un effort herculéen

Avant même d’envisager de conduire un véhicule plus intéressant que le vélo, la personne autiste va devoir passer le permis. C’est, bien souvent, le début des ennuis.

De nombreux autistes souffrent d'anxiété, ce qui n’aide pas, et peuvent avoir besoin de plus de temps pour maîtriser certains gestes ou séquences de gestes. Le fait de se trouver dans une voiture inconnue, à proximité d’une personne inconnue, peut ajouter au stress. D’avoir un instructeur qui minimise l’anxiété de ses élèves et adopte une attitude de type « il suffit de se relaxer ! » est souvent la cerise sur un gâteau pas terrible. On comprend comment, très vite, les leçons de conduite peuvent s’avérer terrifiantes – et je ne parle même pas encore de l’examen.

Mentionner que l’on est autiste lors de son inscription à l’auto-école peut parfois aider, mais parfois produire l’effet inverse si on se retrouve face à des instructeurs ayant des préjugés ou à une administration frileuse. J’ai moi-même eu l’expérience de tenter de m’inscrire dans une auto-école, pour m’entendre répondre que ce serait impossible sans mot de mon médecin expliquant que j’étais bel et bien capable de conduire. Dans la mesure où je n’en avais aucune idée, cherchant précisément à apprendre à conduire, cela n’a pas mené à grand-chose.

 

La progressivité

Je pense qu’il est pertinent de partir du principe que la plupart des autistes seront un jour capables de conduire, mais qu’il est important d’y aller progressivement. Pour beaucoup de neurotypiques, le code et une trentaine d’heures de formation vont suffire à ce qu’ils maîtrisent assez la conduite pour convaincre un instructeur. Grand bien leur fasse, mais pour une catégorie d’individus connus pour mal gérer l’imprévu, leur représentation de l’espace, le multi-tâche et les stimulus autour d’eux, on ne va pas se mettre la tête dans le sable, c’est sans doute un peu court.

 

Mieux vaut y aller plus en douceur, en commençant par exemple par distinguer tout ce qui concerne l’utilisation de la route (l’état de la chaussée, le suivi des trajectoires, la navigation, la signalisation routière, etc) du pilotage du véhicule, et à n’apprendre que l’un des deux à la fois. La première partie peut se faire à pieds, ou lorsque la personne autiste est à vélo[2] ou qu’elle est passagère d’une voiture.

Passer par le vélo peut être une étape intéressante : apprendre à rouler à vélo est notoirement plus simple que d’apprendre à conduire une voiture, il est possible de s’entraîner longuement sur des parkings ou dans des parcs avant de prendre la route pour de bon, et le vélo offre toujours, contrairement à la voiture, l’avantage que son utilisateur peut mettre pied à terre s’il se sent un peu dépassé. Dès que la personne maîtrise le vélo, il lui est possible de rouler avec les automobilistes et ainsi de gagner petit à petit en expérience. Ainsi, lorsqu’elle désirera passer son permis, la seule chose qu’elle devra réellement apprendre sera à conduire une voiture, et non pas à conduire une voiture et comment se comporter sur la route.

 

Je suis autiste et conduire me terrifie

Ça arrive, et dans la mesure où des tas de gens ont des accidents de voiture tous les jours, je dirais que ce n’est pas déraisonnable. Conduire peut être très difficile, et faire très peur. Oui, posséder son propre véhicule est bien sûr une source d’indépendance et de confiance en soi, mais selon les conditions dans lesquelles une personne vit, ce n’est pas forcément obligatoire.

Si une personne ne se sent pas prête à conduire une voiture ou à apprendre à conduire, il n’y a aucune honte à utiliser des méthodes de transport alternatives : transports en commun, vélo, scooter, cheval ou bonne vieille paire de pieds.

 

Dans l’éventualité où quelqu’un vivrait dans des circonstances où il est quasi-obligatoire de posséder une voiture mais que conduire la terrifie, je ne peux que suggérer d’apprendre de manière aussi progressive que possible, en renforçant toujours longuement ce qui est connu avant d’introduire de nouveaux éléments à maîtriser, mais aussi d’en toucher un mot au médecin traitant. Ce dernier pourra sans doute proposer des pistes afin d’aider la personne à gérer son anxiété.

 

Conclusion

Une personne autiste pourra-t-elle un jour conduire ? Ça dépend. De la personne, de son environnement, des circonstances dans lesquelles elle va apprendre. Il me semble une bonne idée de toujours partir du principe que oui, à terme, cela devrait être possible – ne serait-ce que parce qu’il vaut mieux partir gagnant que perdant.

Comme toujours, nous devons néanmoins garder à l’esprit qu’une personne incapable d’acquérir une aptitude, ou capable de l’acquérir mais décidant de ne pas s’en servir parce que cela est trop coûteux en énergie ou en santé mentale pour elle, n’est en rien inférieure à une personne ne rencontrant pas ces difficultés.

Promis, je ne dis pas juste ça pour que mes proches arrêtent de me demander quand je passe le permis.

 

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[1]J’aimerais ne pas avoir à l’admettre, mais je suis complètement le genre de personne qui crie aux piétons de « marcher sur les trottoirs, bon sang ! ».

[2]Si elle sait déjà faire du vélo avec aisance ; si elle est en train d’apprendre, on en revient au même problème.


10 commentaires
  • Bonjour,

    Je tenais à vous remercier pour votre blog, pour cet article, pour vos commentaire.

    Je suis quelque part tristement rassurée de constater que je ne suis pas la seule dans cette situation.

    “Rassurée”, car les expériences qui sont évoquées ici ressemblent à la mienne et me permettent de me sentir moins seule et d’avoir le sentiment d’être comprise. “Tristement” car je constate que rien ou presque n’est fait pour nous permettre de nous intégrer harmonieusement, de nous aider à dépasser nos difficultés (alors que nous travaillons déjà suffisamment en amont sur ces dernières, me semble-t-il!)…

    Je vais avoir 40 ans et je viens tout juste d’être diagnostiquée autiste, durant ma formation au permis de conduire. Pendant 40 ans j’ai simplement été traitée de “sauvage”, “caractère difficile” etc etc et que ce diagnostic soit posé a été une libération. Hypersensible, “hypersensitive” comme dirait un de mes amis, sans arrêt stimulée par l’environnement, l’esprit jamais au repos, agressée par le bruit, le mouvement, la couleur, j’ai mis en place des stratégies de compensation afin de correspondre à ce que la société attendait de moi, aujourd’hui je comprends que je n’avais pas à m’imposer toute cette souffrance et que c’est désormais aux autres personnes de faire un pas vers moi, de m’accepter telle que je suis.

    Seulement cela n’a aucunement incité ma monitrice et mon auto-école à faire preuve d’une quelconque bienveillance, d’un peu de compréhension sur mes difficultés, mes peurs… “C’est simplement dans ta tête, t’as qu’à te bouger un peu” m’a sorti un jour cette femme qui se plaît à répéter qu’elle a 25 ans d’expérience…

    Elle a laissé entendre que dans le cas d’un “handicap léger” comme celui-ci, je devais me faire établir un certificat d’un médecin agréé de la préfecture afin que l’inspecteur tienne compte de ce trouble (selon elle, c’est la procédure et elle avait déjà obtenu un tel document pour une de ses élèves qui faisait partie d’un ESAT)

    J’ai donc pris rendez-vous avec un médecin de la préfecture qui m’a annoncé que de tels certificat n’existaient pas et que je devais réaliser des tests psychotechniques.

    Ma monitrice m’a soutenu que ce type d’attestation était couramment établi, que le médecin de la préfecture ne connaissait pas son métier. Monitrice qui m’a également indiqué qu’il n’était pas du tout nécessaire que j’effectue ces tests. J’ai sincèrement eu l’impression d’être baladée et que pas plus la monitrice que le médecin “ne connaissait son métier” pour reprendre la conclusion de la première…

    Elle m’a donc inscrite au permis sans cette attestation, ni semble-t-il avertir l’inspecteur de ce trouble. Examen auquel j’ai évidemment échoué, l’inspectrice se régalant manifestement d’user d’un ton péremptoire, dédaigneux et particulièrement désagréable qui laissait entendre qu’elle possède un pouvoir sur les candidats et leur avenir…

    Je trouve qu’il est inadmissible qu’une telle discrimination soit toujours opérée alors que l’autisme (et le handicap en général) ne soit pas mieux pris en compte lors de l’examen du permis de conduire, notamment par un test plus “adapté” et qu’il ne se déroule pas en présence d’un inspecteur tenant compte de ce “petit truc en plus”, qui ne se comporte pas comme un despote et qui soit un minimum formé sur ce handicap pour ne pas rajouter au stress de l’examen et à la culpabilité de “ne pas être comme tout le monde”.

    J’espère vraiment qu’un jour quelque chose sera fait concrètement: car c’est bien beau de parler de tolérance, d’intégration mais stricto sensu je n’ai pas du tout l’impression que des moyens sont mis en oeuvre pour permettre aux autistes de trouver une place dans un monde formaté par et pour des neurotypiques (qui souvent ne savent et ne veulent rien savoir de l’autisme qui semble pour eux peu ou prou être un corollaire de la folie ou de la débilité… ou qui, comme ma monitrice me l’a fait comprendre, n’est pas un handicap assez visible pour être pris au sérieux.)

    Alors merci pour ce blog, merci aux gens qui font l’effort de nous comprendre…

    Emmi le
  • Je suis TSA et j’ai complétement abandonné les leçons.
    J’ai eu une première auto-école où c’était l’enfer entre un moniteur qui me hurlait dessus et une responsable qui s’en fichais totalement. J’ai passé l’examen et c’était horrible : l’examinateur voulais me cassait et en retirait de la satisfaction via des remarques désobligeantes et ravissantes. Il m’a fait faire des manœuvres sur une rue en travaux, fait prendre une voie rapide en pleine heure de pointe à 8h30 à Créteil (ville de plus de nonante mille habitants), discutait de ses vacances à mon moniteur et m’a arraché mon volant à la fin visiblement agacé. Sans oublier le fait qu’ils m’ont mis une voiture six vitesses alors que j’ai eu mes leçons sur une cinq vitesses.
    Je conduisais très bien en conduite accompagné avec mon père sur une voiture manuelle mais j’ai tellement de bâtons dans les roues que j’ai préféré abandonner.

    Antoine le
  • Bonjour. C’est avec beaucoup d’interrogations et d’intérêt que j’ai lu autant votre article que les commentaires qui ont suivi. Ma fille de 15 ans peut accéder à la conduite accompagnée, et ça me ferait plaisir de lui offrir ce cadeau. Si c’est un cadeau. Je la crois capable de conduire en n’étant pas seule dans le véhicule pour la rassurer et l’orienter. La conduite accompagnée me paraît un bon compromis. Nous avons rencontré elle et moi une responsable d’auto école qui a été très à l’écoute et pas du tout fermée même lorsque j’ai prononcé le mot “autiste”. Ça m’a semblé positif. Mais il est vrai que je me suis et que je m’inquiète toujours non pas par rapport à l’apprentissage, mais plus aux conditions de l’examen (adapté ? adaptable ?) et aux conditions de la pratique. Vos article comme vos commentaires m’invitent à tenter l’aventure avec elle, d’autant que ça semble lui plaire, et le conseil du vélo (ah ! L’apprentissage du vélo… Quels souvenirs !) me semble une bonne idée pour débuter.

    François le
  • Je souhaite rassurer, ces enfants, ces jeunes adultes qui sont atteints de ce syndromes . Pour avoir moi-même eu un enfant présentant cet autisme d’asperger , avec lequel il a grandi, et apprends à vivre avec, et cela depuis son plus jeune âge.
    Bien sûr, ce sont des personnes qui ont plus de difficulté à s’intégrer de par ce sentiment d’être différent,la crainte de ne pas être compris.
    Leur temps d’adaptation sera plus longue car, en effet, ils sont très anxieux, la peur de mal faire, de décevoir est la cause bien souvent du stress qu’ils l laissent percevoir aux autres. Mais s’ils sont bien encadrés, et qu’ils ressentent du soutien car ils ont besoin qu’on leur fasse confiance pour avancer et croire en eux… Et grâce à cela, ils seront capables de faire face à de nombreuses situations dans la vie pour accomplir leur ambition, et à trouver leur équilibre . Pour ma part, nous avons toujours était présent pour notre fils, et le sommes toujours, et savons qu’il aura toujours ce besoin d’être rebousté, rassuré lorsqu’il doute . Une personne asperger a besoin de savoir qu’il peut compter sur les personnes en qui il a confiance, c’est vital pour son évolution tout au long de sa vie.
    Mon fils aujourd’hui a 23 ans, il a passé ses examens et les a obtenu bac elec, BTS dans la domotique, mais, après plusieurs péripéties il s’est rendu compte qu’il avait du mal à travailler en équipe ce sont des personnes qui se sentent incomprises. Il s’est donc tourné vers le métier de routier, dans lequel il s’épanouit aujourd’hui … Avant cela il a passé tous les permis moto, il a bien sûr le permis B qu’il a eu à ses 18 ans et maintenant il a ses permis poids lourd et super lourd et même les matières dangereuses bref…oui cela est POSSIBLE Tout cela pour vous dire, que la plupart des asperger, sont capables d’accomplir des prouesses quand ils s’en donnent les moyens. " j’ai toujours cru en lui et ses capacités" il a le droit à la AAH qu’il a touché pendant un certain temps,reconnu à 70%,mais a toujours dit qu’il voulait s’en sortir par lui-même et ne pas dépendre de de ces aides . (pour les permis poids lourd ils lui ont été financé, avec l’aide de cap emploi et pôle emploi il avait des droits au chômage)

    Carlier le
  • Bonjour,
    Je suis autiste asperger, j’ai 17 ans et je suis en Terminale Baccalauréat Professionnel. L’année prochaine pour mes études supérieures, je voudrais partir vers Quimper, mais mes parents ne sont pas d’accord pour que je passe mon permis à cause de mon handicap. Je n’arrive pas à gérer mon anxiété et devant un examen je pense que je peut très vite faire une crise d’anxiété. Est ce que c’est possible que je puisse passer mon code sans problème ou pas du tout envisageable.
    Merci de votre compréhension

    Le Guen Lennie le
  • Je suis un possible autiste et j’ai passé trois fois le permis B avant de l’avoir.
    Je suis vigilant en conduite, même pour avoir mon CACES R489.

    FRANCOIS le
  • Bonjour,

    Peut-être que je me trompe, mais étant autiste asperger avec un parcours de vie complexe, qui n’a jamais réussi à avoir son permis, je pense qu’il vaut mieux le permis aux cas où c’est vraiment nécessaire (campagne etc…).

    De plus, pour les aspergers qui ont un parcours de vie complexe et n’ont pas pu aller à l’école, je pense qu’il faut définitivement oublier le permis.

    Personnellement, je ne le repasserais jamais, et je pense même aller voir un médecin de la préfecture pour me faire déclarer définitivement inapte.

    Au passage, les deux autistes dont j’ai lu les livres ne conduisent pas.

    Cordialement,

    Alex

    Alex le
  • Bonjour,
    Avez-vous des recommandations d’auto-école à Paris et RP qui sont formées pour les autistes et donc bienveillantes ?
    En vous remerciant
    Hugues de Castellane

    Hugues de Castellane le
  • Bonjour

    Je suis autiste et conduire ne me pose pas de soucis pour autant que le véhicule me conviennent et n’est pas utilisé par d’autres. Le choix d’un véhicule se fait pour moi en fonction de caractéristiques pour être a mon aise et dans un bon environnement, par exemple il me faut un grand volant, une course de pédale pas trop longue, des boutons de commande bien placé , etc. Aujourd’hui la politique en matière de véhicule de service a changé, nous disposons d’un véhicule de services partagés avec un petit volant, ma hièrarchie ne veut rien entendre, je dois suivre la régles, malheureusement pour moi cela est impossible.

    Sébastien

    Lambert le
  • Oui

    Luvuma Sofia le

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