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Covariation entre latéralisation et neurodivergence - Partie 1

- Julie BOUCHONVILLE

Covariation entre latéralisation et neurodivergence - Partie 1

Les humains ont tendance à être droitiers, tout comme ils ont tendance à être neurotypiques. Les deux faits n’ont, au premier abord, aucun rapport, mais il serait erroné de s’arrêter là. Il semblerait en fait que ne pas être droitier[1] — ce qui, selon les méthodes de mesure, concerne entre 11 % et 19 % de la population — soit lié à la probabilité d’être autiste. Mais pourquoi ? Y a-t-il un lien de causalité ? Et qu’est-ce que la latéralisation, au juste ?

 

La latéralisation

C’est la préférence d’un individu pour les organes d’un côté de son corps, en fonction des tâches à accomplir. Elle est le reflet d’une organisation des structures cérébrales.

Le corps entier est concerné

On pense souvent en premier à la main que l’on utilise pour écrire, mais ce n’est pas le seul élément concerné. Les humains ont aussi en général une oreille préférée, utilisée en priorité lorsque l’on téléphone, un pied préféré pour marcher, dont la semelle de chaussure correspondante sera un peu plus usée, un œil préféré, un côté du bassin préféré, que l’on identifie quand on demande à quelqu’un de tourner sur lui-même sans spécifier le sens, etc. La plupart du temps, ces éléments sont alignés entre eux, c’est-à-dire que la plupart des droitiers favorisent aussi leur oreille droite et leur pied droit, etc., mais ce n’est pas obligatoire et environ 30 % des humains sont hétérogènes à ce sujet.

Même lorsqu’il ne s’agit que des mains, on peut avoir une main préférée pour une tâche, par exemple écrire ou tenir sa fourchette, mais une autre pour un autre type de tâche, par exemple utiliser un outil ou poser des accords sur un instrument à cordes.

 

Cerveau gauche et cerveau droit ?

Le cerveau n’est pas parfaitement symétrique, les structures gérant diverses fonctions n’étant pas réparties tout à fait équitablement entre les hémisphères gauches et droits. À cet agencement biologique de base s’ajoute le reflet de la latéralisation de la personne : un gaucher possède des structures cérébrales liées à la motricité fine de sa main gauche qui n’existent pas pour sa main droite, et ces structures se situent dans l’hémisphère droit[2].

Enfin, le mythe que le « cerveau droit », ou hémisphère droit, serait le siège de l’émotivité et de l’intuition, et l’hémisphère gauche, le lieu de résidence de la rationalité et de la logique, n’est que cela, un mythe. Diverses aptitudes, y compris les outils de réflexion, exploitent diverses zones de nos cerveaux, mais quiconque affirme que « la logique » vivrait dans telle section ou « la sensibilité artistique » dans telle autre, se trompe. Les cerveaux sont des organes trop complexes pour être ainsi grossièrement résumés.

 

Les causes de la latéralisation

Que la latéralisation existe est en soi assez logique ; il est sans doute moins coûteux en ressources et en temps pour le cerveau d’apprendre à effectuer des gestes très spécifiques avec une main plutôt qu’une autre, par exemple, et l’on peut supposer que dans les situations qui requièrent de favoriser un organe plutôt que son homologue, cela finisse par être toujours le même qui est choisi. Néanmoins, rien ne laisse au premier abord penser que la plupart des gens choisiraient d’instinct leur côté droit — si l’on peut seulement parler de choix.

Les gènes semblent jouer un rôle[3] : une quarantaine de gènes participeraient à déterminer la préférence pour un côté, en sachant qu’être gaucher reste rare et, de ce fait, des parents gauchers peuvent avoir un enfant droitier.

Le contexte culturel participe également : la plupart d’entre nous connaissent un parent ou un grand-parent initialement gaucher, mais ayant appris à écrire et tenir ses couverts comme un droitier, parce que dans les années 60 il était encore courant de ne pas laisser les enfants suivre leur préférence naturelle à ce sujet. Le simple fait, pour les parents d’un petit enfant, de lui mettre systématiquement la fourchette ou le crayon dans une main plutôt que l’autre a déjà un impact.

Troisièmement, il existe un lien entre la latéralisation du cerveau et le langage. La majorité des structures liées à l’usage du langage se situent dans l’hémisphère gauche, qui est aussi celui qui contrôle les mouvements du côté droit du corps. Il est possible que les non-droitiers aient une acquisition du langage un peu différente de leurs pairs[4], ou que des troubles du langage modifient la préférence gauche-droite. Il semblerait d’ailleurs que les enfants autistes et non-droitiers présentent plus de troubles du langage que leurs pairs autistes et droitiers.[5]

 

Enfin, et c’est l’objectif de ces articles, d’étranges corrélations existent : ainsi, ne pas être droitier — c’est-à-dire être gaucher ou ambidextre — est positivement corrélé avec le fait d’être homosexuel ou bisexuel[6], ou neurodivergent[7], d’avoir un petit poids de naissance, ou même d’être architecte[8]. Quoi que ce soit qui détermine comment nous allons tenir nos stylos, cela ne peut qu’être complexe.

 

Ayant déblayé le terrain, je laisse ici mon lecteur et le retrouve la semaine prochaine pour aborder la question centrale : pourquoi les autistes ne peuvent-ils pas être droitiers comme tout le monde ?

 

[1]« Pas droitier », selon le contexte, peut signifier « gaucher », « ambidextre », ou une préférence gauche-droite peu établie ou très changeante, c’est à dire une latéralisation incomplète ou absente.

[2]Mon lecteur le sait sans doute, mais les hémisphères cérébraux contrôlent le plus souvent les mouvements des organes du côté du corps opposé. L’oeil gauche est piloté par l’hémisphère droite, la main droite par l’hémisphère gauche, etc. Bien sûr le mouvement n’est qu’une petite partie du contrôle d’un organe : le traitement de l’information visuelle issue de l’oeil gauche, le sens qui est donné à ces images, les souvenirs qu’elles évoquent, etc., tout ceci est susceptible d’utiliser des structures présentent dans les deux hémisphères. De plus, les hémisphères collaborent constamment, par exemple pour lire ce texte et le comprendre.

[3]https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3931166/

[4]Et, bien sûr, nous connaissons tous et toutes un neurotype associé à des troubles du langage.

[5]https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/6580656/

[6]https://en.wikipedia.org/wiki/Handedness_and_sexual_orientation

[7]L’autisme, l’épilepsie et la schizophrénie semblent en tête.

[8]https://edition.cnn.com/2020/08/13/us/national-left-handers-day-trnd/index.html#:~:text=In%20a%201996%20study%2C%20Harvard,left%2Dhanded%20people%20working%20as


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