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Diagnostic et auto-diagnostic de l’autisme - Partie 2

- Julie BOUCHONVILLE

Diagnostic et auto-diagnostic de l’autisme - Partie 2

La semaine dernière, nous avons parlé d’obtenir un diagnostic d’autisme et de la valeur d’un auto-diagnostic. Cette semaine, abordons ensemble deux points qui reviennent souvent dans le débat et concernent les personnes les moins impactées par l’autisme.

 

J’ai l’impression d’être à « la limite » de l’autisme. Est-ce légitime pour moi de me définir comme autiste ?

Nous vivons dans une société qui est très orientée « identité » plutôt que « comportement ». Non pas que ce soit une mauvaise chose, mais je crois que parfois il est utile de se concentrer sur les comportements.

Imaginons Kiwi, une personne qui présente quelques symptômes d’autisme, qui a besoin d’aménagements dans certains domaines précis mais se débrouille très bien dans de nombreux autres. Rappelons-nous que l’autisme est un spectre et que des cas « limites » vont se présenter de plus en plus souvent au fur et à mesure que la population générale sera mieux informée sur la question, selon le mécanisme classique de « ah je ne suis pas juste bizarre ? ».

Kiwi n’a pas de diagnostic officiel. Kiwi peut en revanche tout à fait utiliser ce qu’il sait de l’autisme pour chercher des solutions à ses problèmes : si par exemple il aimerait des objets avec lesquels s’auto-stimuler, il peut chercher sur des sites comme Bien-Être Autiste des jouets étudiés pour le stim. Ou s’il se rend compte que d’interagir avec beaucoup de clients dans le cadre de son travail est trop fatiguant pour lui, il peut en parler sur des groupes d’entraide autiste pour chercher une solution et échanger avec d’autres personnes qui sont dans le même cas. Kiwi peut tout à fait considérer certains de ses comportements comme des « comportements autistes » sans forcément repenser son identité en terme de « autiste vs pas autiste ».


De même, Kiwi peut utiliser le terme « autiste » dans certains aspects de sa vie. S’il est plus facile de se présenter comme autiste à ses collègues pour leur faire comprendre ses difficultés sensorielles, il peut le faire sans avoir besoin d’en parler à, par exemple, sa famille qui sait déjà très bien qu’il déteste certaines odeurs ou la texture de certains tissus. Ce n’est pas galvauder une identité ou mentir que d’utiliser un mot qui nous définit effectivement dans le contexte où nous l’utilisons.

 

Et si Kiwi décidait d’utiliser le terme « autiste » pour se désigner au quotidien alors même qu’il n’est que « un peu autiste », là encore, grand bien lui fasse. Je suis sûre que si Kiwi ressent qu’il est utile pour lui d’intégrer cette étiquette à son identité, c’est qu’il a raison. Tant qu’un auto-diagnostic est sincère et posé avec bienveillance, il est à mon sens inattaquable. Les seuls auto-diagnostics invalides sont ceux qui ne sont pas sincères, et il y a un autre mot plus précis pour les qualifier : des mensonges.

 

En admettant les « cas limites » dans le spectre autistique, ne risque-t-on pas de mal attribuer des aides ? Ou de modifier l’image que le grand public se fait de l’autisme ?

La question de la mauvaise attribution des aides et des aménagements est très pertinente. Je me permets de l’aborder en deux temps : d’abord les aides financières attribuées par le gouvernement et toute intervention similaire. A l’heure actuelle, recevoir une aide de ce type, par exemple l’Aide aux Adultes Handicapés (AAH), nécessite la création d’un dossier auprès des instances appropriées, un paquet de formulaires, un diagnostic officiel et un « taux de handicap » élevé – taux qui est évalué par des professionnels. Et si tout cela est accompli, la personne qui reçoit l’AAH pourra espérer au maximum 900€ par mois. Je pense qu’il est évident que personne qui n’a pas directement besoin de ce genre d’aides pour survivre ne les recevra pas et n’aura de toute façon même pas envie de se lancer dans le parcours pour les demander.

 

Mais les accommodations pour les autistes ne se limitent pas à d’éventuels soutiens financiers. Après tout, une personne autiste peut demander à son employeur d’adapter ses horaires ou de changer l’emplacement de son poste de travail et espérer que sa requête soit reçue avec compassion au vu de sa situation. Elle peut demander à ne pas participer à certaines réunions non-essentielles ou à travailler plus souvent depuis son domicile. Un employeur pourrait être plus compréhensif envers une personne autiste qu’envers un individu neurotypique – sauf si, pourrait-on se dire, tout le monde se déclarait soudain autiste.  Je comprends très bien cette inquiétude, mais je pense que redouter une telle situation revient à se tromper de problème. Si un employeur refusait d’aider l’un de ses employés à être épanoui sur son lieu de travail sous prétexte qu’il y avait déjà aidé d’autres, c’est cet employeur qui aurait un problème. Pas ses employés, fussent-ils tous autistes. Même si une personne peut fonctionner sans casque anti-bruit, par exemple, si elle travaille mieux avec, il est ridicule de le lui refuser. Personne ne devrait frôler la crise d’angoisse ou le burn-out pour qu’on accepte de lui venir en aide.

 

Enfin, pour ce qui est de l’image de l’autisme dans l’esprit du grand public, il est tout à fait vrai que de voir plus de personnes éloignées des stéréotypes classiques se déclarer autistes la changerait. J’ai, pour ma part, vraiment hâte que ce jour arrive.

 

Quels outils de dépistage existent dans le cadre du diagnostic de l’autisme ?

Un outil de dépistage, c’est un outil qui sert à faire une évaluation objective en posant les bonnes questions. En général ces outils sont des questionnaires dont les réponses génèrent un score.
Ce ne sont pas des outils de diagnostic, ils ne vont pas affirmer avec certitude que quelqu’un est autiste ou non, mais si tous les tests sont d’accord pour dire qu’une tendance existe, c’est un bon indicateur. J’encourage donc mon lecteur à se tourner vers ces outils qui peuvent l’aiguiller.

 

Je liste ici quelques liens vers des tests qui me semblent complets. Cette liste n’est pas exhaustive et ne sera sans doute plus valide si mon lecteur lit cet article dix ans après sa publication[1].

Un test en 27 questions pour enfants et adolescents : https://www.esantementale.ca/index.php?ID=27&m=survey

 

Un test en 50 questions assez complet, pour adultes : http://www.psychomedia.qc.ca/tests/quotient-du-spectre-autistique-adulte

 

Un test plus rapide pour adultes mai qui inclut aussi un aspect temporel en posant des questions sur ce que la personne a pu ressentir en étant plus jeune. Ce teste cherche à dépister le syndrome d’asperger soit une certaine forme d’autisme qui se caractérise par de bonnes capacités verbales et un QI normal voire élevé : http://www.psychomedia.qc.ca/tests/echelle-diagnostique-de-l-autisme-et-de-l-asperger-raads-14-screen

 

En conclusion

Une fois de plus, une conclusion de type « l’eau mouille », j’en ai bien peur. Avoir un diagnostic officiel est utile pour certains. Avoir un auto-diagnostic est utile pour d’autres. Se poser des questions est parfaitement acceptable. Si être autiste n’est pas synonyme de handicap en soi, vivre dans une société pensée pour et par les neurotypiques est souvent handicapant. Le plus important est de trouver des méthodes et de bénéficier de l’aide nécessaire pour pouvoir fonctionner au quotidien et s’épanouir autant que possible.

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[1]J’espère sincèrement que nous aurons toujours internet d’ici dix ans et que la civilisation ne se sera pas effondrée.


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