Guide de survie pour gérer les appels téléphoniques
- MARIADNE GUINARD
Nous avons pu voir dans l’article précédent combien les tâches administratives étaient stressantes, et si la paperasse et le rangement de la maison sont surmontés, une autre étape fait partie des épreuves administratives : il s’agit des appels téléphoniques ! Étant donné que les appels téléphoniques sont des épreuves en tant que telles pour les personnes autistes, j’ai décidé de consacrer un article complet uniquement sur ce sujet ! Nous allons proposer d’essayer de comprendre pourquoi les personnes autistes sont si souvent en difficulté avec le téléphone, et comment atténuer autant que possible les ressentis négatifs.
Pourquoi les appels téléphoniques sont-ils particulièrement stressants et compliqués à gérer ?
Le problème du téléphone est qu’il est difficile d’anticiper tous les imprévus. Il faut d’abord se présenter, demander à parler à quelqu’un et peut-être se confronter à un répondeur, un intermédiaire, une secrétaire, et cela constitue parfois un véritable obstacle. Il est difficile de savoir quand la personne sera disponible, parfois la personne que l’on cherche à joindre va nous rappeler à un moment qui ne nous convient pas du tout et tout cela devient vite très stressant. Les numéros masqués, les contacts inconnus sont également très perturbants, car on ne sait pas s’il faut répondre et si cela est important. Si l’appel est indispensable pour réussir un projet ou prendre un rendez-vous médical, il est difficile de l’éviter sans que cela ait de conséquences. Cela va avoir un impact également sur le moral de la personne autiste qui va se sentir incapable et peut rester bloquée tant qu’elle n’a pas réussi à passer cet appel et à avoir le rendez-vous ou les informations nécessaires.
Une fois la décision prise de téléphoner, il est difficile de gérer les aléas : l’humeur de la personne qui décroche, les parasites qui font que l’appel n’est pas de qualité, tel que l’écho, ou un mauvais réseau. Parfois, la ligne peut être soudainement coupée. Le fait de parler à un interlocuteur qu’on ne voit pas peut créer un grand nombre de contresens et de malentendus. Si on n’entend pas bien, il est délicat de faire répéter, et les indications données à l’oral ne sont jamais suffisamment claires pour permettre d’être sûr d’avoir bien compris les informations.
Afin de réussir à surmonter ces épreuves, il est possible d’appliquer certaines méthodes qui aideront à atteindre un objectif et rendre les appels téléphoniques plus efficaces et moins anxiogènes.
Comment s’organiser ?
Afin de réussir votre appel téléphonique et ne rien oublier, limiter le bafouillage, les blancs et les autres difficultés, le mieux est de bien préparer son appel !
- Préparez l’espace où vous allez téléphoner, installez-vous confortablement, de manière à ne pas vous sentir gêné par la lumière, le froid, et veillez à avoir de quoi boire à proximité. Assurez-vous de ne pas être dérangé, mettez-vous dans un endroit calme, fermez les rideaux, les portes et prévenez les personnes qui vivent avec vous que vous allez recevoir un appel important et ne devez être interrompu sous aucun prétexte à moins que ce ne soit une urgence vitale !
- Avant de téléphoner, vous pouvez noter les questions et les choses à dire, gardez un stylo, un papier, un agenda, un ordinateur à proximité afin d’avoir les éléments qui vous seront éventuellement demandés à portée de main. Autant que possible, essayez de passer les appels chez vous, mais si vous devez être ailleurs parce que vous n’avez pas le choix, appliquez les mêmes principes d’organisation que ce soit chez quelqu’un, au travail ou même dans votre voiture.
- Le premier appel peut suivre un ordre précis avec des phrases toutes prêtes, tout d’abord on se présente, on explique le motif de son appel, en formulant poliment un « bonjour », et un « s’il vous plaît », tout passe beaucoup mieux. Ensuite, ne pas hésiter à proposer de prendre un rendez-vous pour parler en prenant le temps au moment qui conviendra le mieux à la personne.
- Sur une autre feuille, il est utile de noter quelques mots clés pour se donner confiance, comme des petits rappels pour ne pas se décomposer si les choses ne se déroulent pas comme on l’espérait. Sur ce papier, vous pouvez noter qu’il est normal de parfois demander de répéter, ou qu’il est possible de demander à l’interlocuteur de nous envoyer les informations par mail.
Afin de gérer ses émotions en temps réel, vous pouvez placer vos pieds au sol pour favoriser l’ancrage, apprendre des techniques pour désamorcer les pensées négatives et l’auto-sabotage grâce à des manuels de thérapies cognitives et comportementales. Il n’est pas grave de devoir s’y reprendre à deux fois pour formuler clairement une question, il suffit de s’excuser en disant « pardon j’ai bafouillé, ce que je voulais vous dire… ». Ces petites phrases permettent de reprendre confiance. De même, cela peut être utile d’informer l’interlocuteur que vous l’entendez mal, en plaçant une petite blague sur la campagne ou les bruits environnants. Le tout est de verbaliser, plutôt que de se figer, se crisper et de se mettre à parler comme un robot. Si la personne à l’autre bout du téléphone peut comprendre votre situation, cela lui permettra de mieux vous aider. Ainsi, pourquoi ne pas dire que vous avez un moment de libre et qu’ensuite vous devez aller chercher votre enfant à l’école, ces petites précisions vont aider l’autre personne à imaginer qui vous êtes et à être un peu plus tolérante si vous éprouvez des difficultés lors de l’appel.
Au téléphone, ce n’est pas le moment idéal pour parler d’autisme, pour cela il vaut mieux être face à une personne afin de voir ses réactions. En effet, le téléphone est très difficile à gérer, car on ne peut se fier qu’aux intonations et il manque les expressions du visage, de plus il faut réussir à ne pas couper la parole et à intervenir au bon moment et à ne rien oublier.
Quand les appels rendent fous !
Mais malgré tout cela certaines circonstances font que même bien préparés, les appels téléphoniques rendent complètement fou et mènent à l’effondrement, les larmes, la colère, le découragement, l’épuisement. En effet, quoi de pire que de tomber sur le répondeur de l’interlocuteur qu’on se prépare à appeler depuis des jours et s’apercevoir que cette personne est en congé. Autre situation si on se rend compte qu’on n’a pas le numéro du bon service et que chaque appel en entraîne un autre puis un autre, la feuille que nous avions préparée devient alors couverte de numéro et de services à rappeler. Parfois, les informations sont contradictoires, et les interlocuteurs se renvoient la balle sans avoir pu fournir la moindre indication valable et aidante. Dans ces moments-là vous ne comprenez plus rien, vous doutez, et il vous faudra quelques jours et plusieurs nuits de réflexion avant de comprendre ce qu’il aurait fallu dire ou faire. Il faut savoir que bien des systèmes notamment les systèmes bancaires répondent à des codes et des logiques qui ne sont pas les nôtres et c’est tout à fait normal de ne pas connaître tous les rouages et de tomber dans une errance difficile de plusieurs jours avant de comprendre quel comportement il faut adopter. Malheureusement, il va falloir prendre son mal en patience et comprendre les règles de leur jeu afin d’espérer obtenir les informations dont vous avez besoin.
Dans ces moments-là, lorsque tout devient compliqué, il faut sortir l’armada et s’équiper avec un arsenal d’éléments de détente, de bien-être et d’aides pour gérer cette crise téléphonique aiguë.
- Ainsi les huiles essentielles, la méditation, la cohérence cardiaque et vos objets favoris seront du plus grand secours pour supporter les interminables minutes d’attentes avant que votre correspondant veuille bien prendre votre appel.
- Avant que votre esprit ne s’emballe et que ce ne soit la pagaille que vous ne puissiez plus penser, et comprendre quoi que ce soit, sortez prendre un bol d’air, allez marcher un peu et tentez de trouver comment apaiser les ressentis négatifs liés à ces appels inutiles et énergivores qui vous font perdre votre temps et votre patience.
- Dans ces moments-là, vous pouvez passer le mode « efficace » et essayer d’être plus ferme dans vos demandes, il n’est plus question de parler de vos enfants ou d’être aimable à outrance, vous avez besoin de réponses et il faut qu’on vous en donne. Essayez de rester correct avec votre interlocuteur et de gérer votre énervement, mais vous avez le droit de dire que vous appelez plusieurs fois sans obtenir gain de cause à votre demande.
Si l’appel se passe mal, que vous n’avez pas obtenu de réponse, que vous avez craqué, que l’interlocuteur a été peu compréhensif, désagréable ou s’est énervé prenez un moment pour vous recentrer et vous apaiser pour faire le vide.
- Notez ensuite sur un papier comment les choses auraient pu être améliorées. Sur ce papier, notez vos pires pensées et essayez de les nuancer. Par exemple, si vous vous êtes senti nul, vous pouvez essayer de formuler une pensée positive, telle que le fait que vous y arriverez mieux la prochaine fois.
- Essayez de ne pas vous sentir le seul responsable et de voir ce qui peut être mis en place pour obtenir une réponse ou de trouver un interlocuteur plus compréhensif.
- Les thérapeutes formés en TCC (thérapie comportementale et cognitive) pourront vous aider à déconstruire les pensées négatives et à trouver des alternatives, des solutions afin de ne pas devenir totalement phobique du téléphone.
- Lorsque l’appel est vraiment difficile, essayez de passer par les échanges par mail si cela est possible, certains interlocuteurs et services administratifs ont l’habitude de gérer les démarches par mail et n’y verront pas d’inconvénient, cela aura l’avantage de vous laisser le temps de la réflexion et de trouver les bons et l’attitude adaptée à la situation sans vous retrouver pressé par les difficultés de compréhension.
L’indispensable de l’appel téléphonique
Pendant ou en attendant l’appel, le mieux est de laisser son stress passer sur un objet, l’avantage du téléphone est que personne ne vous voit alors c’est le moment de se laisser aller en termes de stims ! Cela peut être le fait de dessiner sur une feuille ou de jouer avec un objet qui vous détend et vous apporte du réconfort. Votre stylo, un casse tête, un embout de crayon ou un collier à mâchouiller. Il est également possible de s’installer avec une couverture lestée sur le dos, un coussin à picots, ou une bouillotte afin d’être le plus détendu possible.
De nombreux objets présents sur le site Bien être autiste peuvent remplir cette fonction, nous avons décidé de vous en présenter un qui vous occupera à merveille pendant les temps d’attentes lors d’un appel téléphonique.
Le Fidget Cube pentagone
Quoi de mieux qu’un cube avec plusieurs fonctionnalités pour patienter et supporter les musiques d’attentes, pour garder son calme et sa concentration. Des picots, des lanières, un bouton, des crans à tourner, des curseurs à bouger, des boules, tout ce qu’il faut pour s’autostimuler et parvenir à gérer ses émotions pendant l’appel téléphonique. On peut ainsi le faire tourner, le faire rouler, appuyer sur les boutons, ces fonctions auront un rôle d’antistress parfait.
Le cube existe avec un fond de quatre couleurs différentes, il existe en noir, en bleu, en rose ou en blanc
Ce cube est déconseillé aux enfants de moins de 5 ans, il est composé principalement de plastique et de silicone.
Sa taille est de 9,2 cm x 6,1 cm x 7,4 cm autant dire qu’il tient dans votre sac et peut être emporté partout.
En Conclusion
Pour les personnes autistes, les imprévus liés aux appels téléphoniques sont vraiment anxiogènes. Nous avons pu voir qu’avec un peu d’organisation et de persévérance, il est possible de se sentir un peu moins stressé et de parvenir à être clair au téléphone sans perdre ses moyens. Comme le téléphone reste un outil difficile à utiliser pour de nombreuses personnes autistes, il sera important de favoriser des périodes sans appels téléphoniques afin de ne pas aller jusqu’à la surcharge et l’épuisement.
Encre faut il avoir un téléphone et qu’il soit en état de fonctionnement et avec du crédit d’appel, vu le nombre d’autistes marginalisés (sans conotation péjorative) avec peu de ressources financieres à consacrer au préhistorique moyende communication qu’est le téléphone. Perso je suis totalement et volontairement injoignable, vous ne tombez même pas sur une messagerie et je ne téléphone pas à autrui. Mais oui on peut se plier en milles et s’adapter à toutes sortes de situations et attentes des autres, avec plus ou mois de bénéfices (et l’article est vraiment un bon coaching), comme les gauchers ont longtemps laissé des personnes les obliger à ecrire de la maindroite.