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Cocasse synesthésie

- Julie BOUCHONVILLE

Cocasse synesthésie

Mon lecteur est-il familier de ce concept au nom barbare ? Est-il lui-même synesthète ? Répandue chez les humains au sens large mais plus courante chez les autistes, la synesthésie est un désordre bénin du traitement des informations sensorielles, qui implique qu’un input d’un certain sens génère une réaction d’un autre sens, de manière subjective.

Décortiquons la situation ensemble.

 

Clarifions

La synesthésie peut prendre de multiples apparences. Parmi les plus courantes, on retrouve une connexion concept-couleur et, de manière plus vaste, des sensations « fantômes ». Par exemple, une personne synesthète peut « voir » certains chiffres ou certains jours de la semaine dans une couleur donnée lorsqu’elle lit leur nom ou leur symbole ou même, les imagine dans son esprit. Il est d’ailleurs fréquent de voir des synesthètes discuter entre eux de la « vraie » couleur des nombres (« Deux est vert ! » « Vert ? Ridicule, deux est noir ! »).

La sensation fantôme est la possibilité d’extrapoler une sensation non-visuelle sur base d’une information visuelle. Par exemple, voir un tissu et savoir, exactement comme si on était en train de le toucher, quelle serait son ressenti sous les doigts[1]. Bien sûr, chez les autistes, cela peut mener à un dégoût visuel vis-à-vis des textures que nous ne supportons pas de toucher, puisque les regarder suffit à nous générer une sensation tactile.

D’autres variations de la synesthésie impliquent d’associer une odeur à un son, une couleur à un goût, une température à une texture, etc. Il est parfois admis que la misophonie, qui consiste en une réaction émotionnelle intense lorsque la personne entend certains sons, est peut-être une forme de synesthésie.

 

D’où est-ce que cela vient ?

En gros ? On ne sait pas très bien. La population moyenne compte environ 4 % de synesthètes[2], et il semblerait qu’il y ait au moins un facteur génétique qui entre en jeu. Le fait est que la condition est assez peu étudiée, n’étant pas très impactante pour ceux qui vivent avec. On sait en revanche que l’on peut induire de la synesthésie avec certaines substances hallucinogènes, ce qui implique que les mécanismes liés au traitement et à la production de sérotonine peuvent aussi participer au processus.

Une autre théorie est que les liens « anormaux » entre les sens pourraient être dus à une mauvaise réduction des connections neuronales comme cela a lieu au début de la croissance. C’est aussi selon ce modèle que l’on explique parfois l’autisme, un élagage incomplet des connections qui amène à un fonctionnement différent[3].

 

Les personnes autistes seraient plus concernées par le phénomène que les non-autistes, bien que cela soit une théorie qui se dégage des témoignages plutôt qu’un fait avéré. En plus du classique « les chiffres ont une couleur », qui peut amener de l’inconfort quand on manipule des chiffres colorés dans un cadre didactique et qu’ils n’ont pas la bonne couleur, il semblerait que nous interprétons plusieurs types d’input comme des sensations physiques. Cela peut inclure certains sons qui créent chez nous une sensation tactile, le « poids » du regard des autres, où regarder quelqu’un dans les yeux nous donne une sensation de pression, ou des sensations fantômes liées au toucher comme je l’ai décrit plus haut.

Comme nous sommes notoirement mauvais pour gérer nos informations sensorielles, il est possible qu’une surcharge d’un sens « déleste » dans une autre catégorie d’informations sensorielles, par exemple le chaos visuel d’un grand magasin qui nous rend plus ou moins sourds parce qu’incapables de traiter des informations sonores.

 

Je suis synesthète ! Je fais quoi ?

Ce que vous voudrez. La synesthésie a tendance à être corrélée à une bonne capacité de mémorisation, parce que l’information sensorielle « en plus » peut aider le processus. Également, les personnes synesthètes ont en général une longueur d’avance lorsqu’il s’agit d’être créatives et/ou artistiques, dans la mesure où leur cerveau leur fournit de base des parallèles intéressants.

Des problèmes peuvent en revanche se manifester si la personne a des aversions fortes envers certaines sensations subjectives, générées par son propre cerveau, et qu’elles sont associées à des sensations objectives, générées par son environnement : à terme, elle peut développer une aversion pour des stimulus parfaitement inoffensifs. Il est important de respecter autant que possible ses goûts et dégoûts, même s’ils semblent triviaux, dans la mesure où ils peuvent être connectés à une expérience qu’un observateur extérieur n’imagine même pas.

Cela implique aussi, pour mon lecteur autiste, de ne pas se forcer à continuer une expérience sous prétexte que « ça devrait aller ». S’il déteste la couverture verte non pas parce qu’elle gratte mais parce que la nuance de vert lui rappelle la fois où il a mangé de l’angélique confite et découvert que rien n’est aussi abominable que l’angélique confite, et ne peut de ce fait voir la couverture sans repenser à ce goût effroyable, c’est OK de ne pas utiliser la couverture verte. La vie est trop courte pour penser à de l’angélique tous les jours.

 

[1]Anecdote tangente mais néanmoins amusante : il semblerait que tant qu’une personne a touché l'objet, elle soit capable d’imaginer sa texture si elle le léchait. Mon lecteur est-il capable de « savoir » quelle texture aurait le carrelage de son salon sous la langue ? Celle de la table de la cuisine ? Les feuilles de l’arbre le plus proche ? Son écorce ? La peau de son propre dos ?

[2]https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4265978/

[3]https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/jnr.24616


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