Dysfonction exécutive : stratégies générales
- Julie BOUCHONVILLE
La dernière fois, j’ai proposé à mon lecteur un rappel de ce qu’est la dysfonction exécutive et de son impact. Trouvant toutefois que, dans le domaine de la santé mentale, le pourquoi est souvent moins important que le comment, j’enchaîne désormais avec une première fournée de stratégies susceptibles d’améliorer ces fameuses fonctions.
Interventions générales : la bonne santé physique et mentale
Pour beaucoup d’entre nous, que l’on soit autiste ou non, notre état général a tendance à impacter notre fonction exécutive. Qui n’a jamais constaté qu’il commettait plus d’erreurs ou que les distractions lui étaient plus pénibles lorsqu’il était fatigué ou malade ?
Pour maximiser la fonction exécutive, il nous faudra donc être en généralement bon état, quoi que cela veuille dire pour chaque personne, et également s’assurer que certaines fonctions basiques, cruciales pour les autistes, tournent correctement.
De la bonne santé mentale et physique de la personne autiste
– Bon équilibre de la sérotonine : alimentation équilibrée et/ou complémentée, sommeil correct, luminothérapie en hiver si cela semble pertinent, hydratation correcte, addictions et/ou TDAH pris en charge le cas échéant
– Intéroception optimisée : comme mentionné dans plusieurs articles précédents[1] [2], les personnes autistes ont souvent du mal à réaliser ce qui se passe dans leur corps, et peuvent de ce fait ignorer des besoins inassouvis. Ces besoins continuent néanmoins d’exister, voire se font plus pressants, et peuvent diminuer les performances du corps tout entier. Une intéroception aussi optimisée que possible, quoi que cela veuille dire d’une personne à l’autre, c’est une meilleure compréhension des besoins et donc moins de situations où le corps et/ou l’esprit ne tournent pas au mieux de leurs capacités.
– Identification et remédiation des facteurs de stress majeurs : une remarque très bateau, j’en ai conscience, mais qu’il me semble néanmoins pertinent de mentionner. Il est très difficile de fonctionner correctement, que l’on soit autiste ou pas, si l’on vit sous pression, ou avec une source d’anxiété majeure. J’ai conscience qu’il n’est pas toujours facile de résoudre ces situations, et qu’on peut même les vivre comme impossibles à modifier. Il peut être pertinent de demander de l’aide à un professionnel dans ces cas, et en attendant, de faire preuve de douceur envers soi-même : quand on vit dans ce que notre système nerveux interprète comme une zone de guerre, il est plutôt normal d’avoir du mal à se rappeler de sortir les poubelles.
– Méditation, cohérence cardiaque, autre technique de gestion des émotions et relaxation : là encore un peu bateau, mais si ces approches sont de tels classiques, c’est parce qu’elles fonctionnent. La manière de les mettre en place peut être très variable et personnalisée, et la technique qui fait mouche pour l’un ne le fera pas forcément pour l’autre : faire des recherches jusqu’à trouver ce qui aide indubitablement notre santé mentale vaut la peine[3].
Interventions générales mais un peu orientées
Je les nuance ainsi parce qu’elles ne sont, à mes yeux, pas encore strictement spécifiques à la dysfonction exécutive, mais vont néanmoins déjà un peu plus dans cette direction :
– Narration de la tâche en cours : expliquer ce que l’on fait et pourquoi, à voix haute comme à une audience, nous oblige à intellectualiser nos actions, hors c’est précisément ce que nous avons tendance à omettre.
Comme je l’avais mentionné dans la première partie[4] de cette série, nous ne sommes ni bêtes ni illogiques, c’est juste que le lien cause-conséquence entre une action et son impact sur le résultat final d’un plan ne se fait pas toujours automatiquement pour nous. Raconter à voix haute ce qui se passe ramène de la conscience dans le processus et peut ainsi nous faire identifier des liens de causalités qui ne nous sautaient pas aux yeux autrement.
– Pratique d’une activité sportive type jeu, incluant au moins deux participants : cette activité, qu’il s’agisse d’un sport de raquette, du chat perché compétitif, d’ultimate frisbee ou que sais-je, sera pertinente à la fois pour son impact sur la proprioception et l’intéroception, mais aussi parce qu’elle mobilise toutes les fonctions exécutives dans un contexte différent.
Examiner ce qui se passe sur le terrain, ce que font les adversaires et les co-équipiers, déterminer une stratégie, la changer selon les évènements en cours, ignorer les données inutiles pour ne garder que celles qui sont pertinentes, comprendre quand démarrer une action et quand l’éteindre, etc., tout ceci est mobilisé dans ce genre de pratiques.
Il conviendra, pour réussir à implémenter une activité de ce genre, d’en chercher une qui intéresse réellement la personne concernée, et de commencer sa pratique dans un contexte amical, en évitant de sauter directement dans la compétition. Il est très facile d’être dégoûté d’une activité si on s’y fait complètement écrabouiller les premières fois que l’on s’y adonne.
On notera enfin que la pratique d’une activité sportive est en général bénéfique pour la santé physique comme mentale, pour les autistes comme pour les autres. Trouver un sport qui nous plaise est donc pertinent pour de multiples raisons.
Je laisse ici mon lecteur sur sa faim, et aborderai la semaine prochaine les stratégies les plus spécifiques.
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